
À travers l’histoire de l’automobile, de nombreux modèles ont laissé une marque indélébile auprès du grand public. C’est le cas de la Citroën DS (1955-1975), dont la présentation nous ramène 70 ans en arrière.
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La Citroën DS a été produite de 1955 à 1975
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La voiture est reconnue pour avoir sauvé la vie du Général de Gaulle
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En 20 ans, quelque 1,5 million d’exemplaires ont été vendus
Pour que l’on parle d’un modèle qui n’est plus produit depuis 50 ans, c’est qu’il avait quelque chose d’exceptionnel. D’ailleurs, Citroën se sert toujours du nom DS, car il résonne encore auprès du public.
Mais qu’en est-il de cette Déesse qui est venue ébranler l’industrie, le 6 octobre 1955, alors qu’elle a séduit tous ceux qui ont pu la voir lors de son dévoilement au Salon de l’auto de Paris ?
Ça tient à une foule de facteurs, comme vous allez bientôt le constater.
Un style inimitable
La première chose qui frappe à propos de cette voiture, c’est de toute évidence son design. Son créateur, Flaminio Bertoni, signait littéralement un chef-d’œuvre. Ce styliste et sculpteur italien a été marquant dans l’histoire de Citroën. C’est lui qui avait signé les Traction Avant, 2CV, Type H, et qui va récidiver avec l’Ami, au début des années 60.
Concernant la DS, jamais les gens n’avaient mis les yeux sur une voiture au style si aérodynamique, aux lignes si uniques. Plus de sept décennies plus tard, on demeure ébahi à la vue de ce véhicule.
On ne regarde pas une Citroën DS ; on la contemple.

D’ailleurs, lorsqu’elle est dévoilée, la foule présente au salon se masse pour voir celle qui semblait directement sortie du futur. Les représentants de la marque sont submergés de questions. En 45 minutes seulement, 749 commandes sont passées pour celle qui vient à peine d’être présentée. Le soir même, le décompte est à 12 000. Après une semaine, Citroën avait reçu 80 000 confirmations.
Un tel impact était inédit.
Esthétiquement, notez que les lignes du modèle vont demeurer essentiellement les mêmes pendant 20 ans. La principale évolution surviendra en 1968 avec l’adoption de phares cachés sous des vitres qui ne faisaient qu’un avec la carrosserie. Et parce que Citroën ne faisait rien comme les autres, les optiques intérieures pivotaient avec le volant (grâce à un lien mécanique) pour éclairer la route dans les virages. C’était une première à l’époque.
Des débuts difficiles
Malgré l’engouement, les débuts du modèle seront difficiles. Il faut savoir que la compagnie traversait une période trouble et que son produit phare, la Traction Avant, en était à sa 21e année sur le marché. Avec la présentation du Salon de l’auto à Paris, quelque chose devait être fait pour redorer le blason de la compagnie.

Le hic, c’est que la DS profitait d’un bouquet d’innovations qui n’étaient pas toutes au point, surtout pour une production de masse. Le résultat, c’est que les premiers exemplaires furent touchés par une foule de problèmes reliés à la fiabilité, notamment avec la suspension hydropneumatique, révolutionnaire pour son temps. Même que les dépositaires de la marque ne disposaient pas encore de tous les manuels nécessaires pour effectuer les réparations. Disons que ça a laissé certains clients très frustrés.
Cela aurait pu avoir un impact dévastateur pour la suite de l’histoire du modèle, mais heureusement, Citroën a rapidement apporté des ajustements, et dès la fin de 1956, et clairement en 1957, les travers des premières éditions étaient en grande partie corrigés. Et, incroyablement, en 1962, un événement politique va venir mousser la popularité du véhicule.
L’attentat du Petit-Clamart
L’attentat du Petit-Clamart survient le 22 août 1962. Il s’agit d’une tentative d’assassinat contre la personne du général Charles de Gaulle, qui est alors le président de la République française. C’est l’OAS (Organisation armée secrète), hostile à la politique d’indépendance de l’Algérie, qui organise le coup. On souhaitait éliminer le dirigeant que l’on jugeait comme un traître à la cause de l’Algérie française.

Toujours est-il qu’au moment où la DS présidentielle circule sur la route du Petit-Clamart, près de Paris, des hommes embusqués ouvrent le feu sur la DS. Deux pneus sont crevés, mais le conducteur appuie sur l’accélérateur. La voiture, grâce à sa stabilité, réussit à fuir la région dangereuse, sauvant au passage la vie du président et de son épouse.
L’image du Général de Gaulle en sortira renforcée, tout comme la réputation de la DS, portée alors au rang de légende automobile, symbole de survie et preuve de la grande ingénierie française.
Vingt ans en avance sur son temps
Au moment de son retrait de la circulation, en 1975, la DS était encore supérieure aux modèles tout neufs qui étaient présentés. Il est donc juste de dire qu’elle était vingt ans en avance sur son temps, au minimum.
Et qu’est-ce qui rendait cette voiture si exceptionnelle, outre son design ?

Il y avait bien sûr cette suspension indépendante hydropneumatique, qui faisait qu’elle flottait sur la route. En fait, il était possible de surélever la DS pour traverser des obstacles. À l’arrêt, elle s’écrasait pratiquement contre le sol. Elle profitait en plus de freins à disque à deux circuits à l’avant (tambours à l’arrière), en plus d’une assistance hydraulique à haute pression pour le système de freinage, ainsi que pour la crémaillère. Ses panneaux de carrosserie étaient amovibles, ce qui facilitait les réparations. Le panneau arrière, par exemple, tenait avec un boulon et la clef qui permettait de le retirer était la même que celle qu’il fallait utiliser pour les roues. Enfin, sa configuration à traction et le fait que la voie avant était plus large que la voie arrière rendaient sa maniabilité exceptionnelle pour son époque. Elle était même chaussée de pneus radiaux, ce qui était loin d’être la norme.
DS19, DS21, DS23
En 20 ans, on aura droit à trois versions principales de la DS, soit des éditions portant les chiffres 19, 21 et 23. La signification était très simple ; ça renvoyait aux mécaniques 4-cylindres de 1,9, 2,1 et 2,3 litres.
Au départ, la DS19 proposait quelque 75 chevaux et un couple de 97 livres-pieds. En 1961, avec l’ajout d’un carburateur à double corps, la prestation passe à environ 95 chevaux. En 1965, la DS21 fait ses débuts et vient offrir autour de 125 forces et le même couple. Enfin, en 1972, la DS23 fait ses débuts, avec une cavalerie qui va être poussée autour de 141 chevaux, avec un couple maximal de 148 livres-pieds.
Il faut être prudents avec les chiffres ; beaucoup de sources et beaucoup de variations, sans compter que des changements étaient souvent faits à la voiture, comme l’injection de carburant.

Néanmoins, vous le voyez, on ne parlait pas d’une bombe, loin de là. Cependant, sa grande stabilité faisait qu’il était facile d’atteindre les 180 km/h derrière son volant.
Henri Chapron et les décapotables
Officiellement, Citroën ne proposait pas sa DS en version décapotable. Cependant, elle faisait affaire avec le carrossier constructeur Henri Chapron pour la conversion de modèles en cabriolet. Concrètement, Citroën envoyait à Chapron une plateforme et une structure renforcées, dérivées de la variante familiale du modèle qui était plus solide à la base.

En tout, 1365 exemplaires seront fabriqués sur une vingtaine d’années, des modèles que la compagnie identifiait comme des cabriolets d’usine. La nuance est importante, car Henri Chapron aurait assemblé 300 autres décapotables, non reconnues par Citroën.
Pallas
Outre les Citroën Chapron, un autre modèle prestigieux a marqué l’histoire de ce modèle, soit les versions Pallas, introduites en 1964 avec la DS19. Le nom renvoyait à la mythologie grecque et particulièrement à la déesse de la sagesse, Athéna. On avait droit à une déclinaison plus luxueuse dotée de moquettes plus chics, d’une abondance de chrome et d’une insonorisation plus relevée, entre autres.

Ces variantes sont très recherchées par les collectionneurs, spécialement celles issues de la série 23.
En 20 ans, quelque 1,5 million de Citroën DS ont été vendues.
Conclusion
Nous pourrions continuer longuement sur la riche histoire de la Citroën DS, pour vous mentionner par exemple qu’un modèle plus abordable avait été proposé (l’ID19), ou encore que des versions ont servi les forces policières, les services d’urgence, et bien sûr le bureau de la présidence, avec des variantes renforcées et blindées, après l’attentat du Petit-Clamart.

La Citroën DS était en avance sur son temps et même aujourd’hui, elle demeure une référence en matière d’ingénierie.
Assurément l’un des plus grands coups de Citroën.











