Sans subventions, les ventes de VE chutent : les politiques peuvent-elles suivre le rythme des réalités des consommateurs ?
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Les ventes de VE diminuent fortement lorsque les subventions sont supprimées, comme on l’a vu en Allemagne.
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En l’absence d’incitatifs, les consommateurs risquent de donner la priorité aux véhicules hybrides et à essence plutôt qu’aux coûteux VE.
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Les perturbations du marché provoquées par des mesures hâtives en faveur des VE pourraient refléter les hausses de prix et les pénuries de l’époque de la pandémie.
La chute spectaculaire de 28 % des ventes de VE en Allemagne l’année dernière devrait servir de signal d’alarme pour les gouvernements qui proposent des calendriers d’électrification agressifs. La corrélation entre la réduction des subventions et l’effondrement des ventes de VE est difficile à ignorer. Alors que le Canada et le Québec maintiennent des plans ambitieux et plutôt agressifs pour éliminer progressivement les véhicules à essence, il convient de se demander si les subventions sont le ciment de ces politiques – et ce qui se passe lorsqu’elles disparaissent.
En Allemagne, les VE ne représenteront que 13,5 % des ventes de voitures neuves en 2024, après la suppression des incitations pouvant atteindre 4 500 euros. Dans le même temps, les ventes d’hybrides ont fait un bond de 12,7 %, et les hybrides rechargeables (VEHR) ont augmenté de 9,2 %. Les acheteurs s’orientent clairement vers des véhicules qui concilient l’électrification et les moteurs à combustion habituels, d’autant plus que le soutien financier du gouvernement disparaît.
Plus près de nous, le Québec est déjà confronté à sa propre crise des subventions. En raison de l’épuisement des fonds, les incitations à l’achat de VE ont été suspendues et la province les supprimera progressivement à partir de 2025. Compte tenu des taux d’adoption historiquement élevés des VE au Québec, cette suspension pourrait préfigurer un déclin similaire. Si les VE restent inabordables pour l’acheteur moyen sans aide gouvernementale, les ventes pourraient s’effondrer, tout comme en Allemagne.
Cette situation soulève plusieurs questions pressantes. Si les gouvernements sont déterminés à imposer l’adoption des VE, doivent-ils continuer à offrir des incitations indéfiniment ? Les constructeurs automobiles sont-ils censés absorber ces coûts en baissant leurs prix, ce qui aurait pour effet de réduire leurs marges ? Et que se passera-t-il si les consommateurs refusent d’obtempérer et optent plutôt pour des véhicules hybrides, des véhicules hybrides rechargeables ou des véhicules à essence ?
Ce dernier scénario mérite d’être exploré. Les acheteurs pourraient opter pour des groupes motopropulseurs traditionnels jusqu’en 2034, puis conserver leurs véhicules bien au-delà de 2035, ce qui leur permettrait d’échapper à l’obligation de se procurer des VE. Cette situation pourrait refléter la crise des inventaires induite par la pandémie, au cours de laquelle la demande de véhicules d’occasion a explosé, les prix des voitures d’occasions et neuves ont grimpé et le marché a été confronté à des perturbations prolongées.
L’hypothèse selon laquelle les VE s’imposeront naturellement sur le marché ne tient pas compte des réalités économiques. Les consommateurs veulent de la valeur et des prix abordables, pas seulement des promesses technologiques. Les constructeurs automobiles sont des entreprises, et si les VE ne se vendent pas, ils se concentreront sur des modèles rentables, probablement des hybrides et des VHR. Et s’ils ne peuvent pas gagner de l’argent dans certaines régions, combien de temps resteront-ils ? Le bon côté des choses, c’est que des marchés comme la Californie, ainsi que d’autres États et le tout-dernier 51e État nouvellement créé (mauvaise blague…), pourraient être suffisamment puissants pour amener les constructeurs automobiles à capituler et à abandonner complètement les moteurs à combustion interne pour l’ensemble du marché nord-américain. Pour cela, il faudrait qu’ils soient TOUS d’accord avec le plan – un scénario très improbable. Aussi, il est naïf de penser qu’un constructeur automobile comme Volkswagen, Toyota ou GM, qui vendent entre six et dix millions de véhicules par an dans le monde, va bouleverser son activité, ne serait-ce que pour 25 % de ses ventes.
Bien que je sois personnellement favorable à l’adoption des VE, je ne peux tolérer que les gouvernements imposent des changements sans tenir compte de l’opinion publique ou des contraintes financières. Les incitations ont clairement joué un rôle essentiel dans l’accessibilité des VE et les supprimer prématurément risque de ralentir les progrès. Si les décideurs politiques sont sérieux au sujet d’une transition verte (ou bleue…), ils doivent décider si leurs politiques bénéficient d’un soutien durable ou s’ils attendent des constructeurs automobiles et des consommateurs qu’ils paient la facture. À mon avis, les incitatifs n’auraient jamais dû être proposés par les instances dirigeantes, car elles ont complètement faussé le marché.
Exemple concret : je suis en train de magasiner un nouveau véhicule électrique et je suis contrarié par le fait que les « rabais » réduits me coûteront plus de 100 $ de plus par mois (sur un contrat de location de 48 mois !) qu’il y a moins de deux semaines. Je suis d’accord pour dire que j’économiserai sur les coûts de carburant, mais le véhicule électrique que je considère se vend près de 12 000 $ de plus qu’un modèle équivalent à moteur à combustion interne. Si l’on ajoute à cela une prime d’assurance automobile considérablement plus élevée, je commence à sérieusement remettre en question mes projets. Combien d’autres consommateurs arriveront à la même conclusion ?
En fin de compte, le marché des VE ne peut pas prospérer uniquement grâce à des idéaux. Il a besoin de stabilité, que ce soit grâce à des subventions, à l’innovation ou à la confiance des consommateurs. En attendant, les gouvernements qui encouragent l’adoption des VE devraient agir avec prudence pour éviter de nous plonger dans l’incertitude économique et automobile.
Et finalement, je n’ai même pas encore parlé de l’infrastructure de recharge ou des valeurs de revente des VE.