L’adoption à l’unanimité de la loi Zéro émission à l’Assemblée Nationale a sans doute plus aux groupes environnementalistes qui l’attendaient depuis longtemps, mais les constructeurs automobiles, eux, réservent leur jugement.
Dans la plupart des cas, ils préfèrent attendre une réglementation précise avant de prendre position. Et c’est d’ailleurs ce qu’avait exprimé l’organisme Global Automakers of Canada il y a quelques semaines, au moment où la loi était encore à l’étude.
Pour certains manufacturiers cependant, la nouvelle n’est pas exactement bonne, même s’ils sont convaincus de la nécessité de corriger le tir en matière de gaz à effet de serre. C’est notamment le cas de Mazda Canada, un constructeur qui ne dispose d’aucun véhicule zéro émission dans son catalogue, et qui n’a même pas de projet, annoncé publiquement, d’en produire un.
« Bien sûr, il faudra attendre tous les détails avant de se prononcer formellement. Mais nous trouvons un peu abusif ce genre de comportement du Gouvernement qui tente de promouvoir une stratégie sans tenir compte de tous les aspects. Nous, par exemple, respectons actuellement toutes les normes environnementales les plus exigeantes en Californie, même si nous utilisons des moteurs à essence. Nous savons que ces normes deviendront plus difficiles à atteindre au fil des ans, et nous nous tournerons vers une forme d’électrification, mais l’usage de nos moteurs à combustion super efficaces nous permet d’atteindre les cibles tout en nous laissant assez de marge de manœuvre pour compléter notre stratégie », explique Sandra Lemaitre, directrice des communications de Mazda Canada.
« Déjà, l’aide financière apportée aux voitures électriques nous pénalisent comme constructeur, malgré nos efforts d’efficacité. Cette loi ne fera qu’accentuer ce décalage, mais on verra comment elle s’appliquera dans les faits », conclut-elle.
Du côté du constructeur Hyundai, le ton est plus modéré, mais tout aussi inquiet. « Nous sommes une entreprise qui voulons avoir un véritable rôle à jouer dans ce domaine, mais nous devons attendre plus de précision. Nous croyons, par exemple, que les voitures à hydrogène sont une portion importante de l’avenir, et nous souhaitons que le Gouvernement jugera cette technologie toute aussi importante que les autres », a souligné Chad Heard, responsable des communications chez Hyundai.
« Que ce soit pure électrique ou hydrogène, nous sommes conscients qu’un geste doit être posé. Évidemment, cela nous avantagera en matière de vente, mais nous continuons les discussions avec les gouvernements, notamment le fédéral, pour l’établissement et une meilleure reconnaissance des voitures à pile à combustible. En fait, on espère que dans tous leurs gestes, les gouvernements seront agnostiques en matière de technologie ».
Quant à General Motors, l’attitude est au beau fixe. Le porte-parole, George Saratlic, voit dans cette loi une simple concrétisation de ce que son entreprise a déjà commencé. « La Chevrolet Volt est déjà la voiture électrique la plus vendue. Avec la venue de la Bolt dans quelques mois, nous sommes en excellente position et cette loi nous permettra de poursuivre sur cette lancée. Reste à savoir maintenant quelles en seront les règles précises mais pour nous, il s’agit d’un pas dans la bonne direction », a-t-il conclut.
Rappelons que l’Assemblée nationale a adopté unanimement la loi 104, loi visant l’augmentation du nombre de véhicules automobiles zéro émission au Québec afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et autres polluants. Un comité a été formé et déposera « sous peu » un projet de règlements pour son application, a expliqué le ministre de l’Environnement et responsable du dossier, David Heurtel, en conférence de presse.
Déjà 10 états américains possèdent une loi de cette nature, et le Québec devient la première province à se doter d’une telle législation dont l’objectif est de forcer la vente de véhicules zéro émission au Québec.